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Hégémonie Galactique

Il y a 970 millions d’années

Des espèces intelligentes gouvernent-elles la galaxie ?

L’architecture titanesque du Parlement de l’Hégémonie Galactique semblait avoir été conçue pour écraser l’ego individuel des différentes délégations.

Constitué des particularités visuelles issues des différentes espèces, assemblées de façon magistrale, le message envoyé était que cette union supplantait en puissance toute prétention purement raciale. Les différentes cultures semblaient ainsi soudées dans le marbre, coagulées en une entité plus puissante.

Arrivée bonne dernière dans cette Hégémonie, l’architecture humaine était la seule encore absente de l’édifice.

“Arrivée bonne dernière et par la porte de derrière” pensait Balador, le représentant de la délégation humaine, en pensant aux multiples tractations financières et arrangements de couloirs qui avaient été nécessaires pour intégrer l’humanité dans l’Hégémonie.

Balador était accompagné de son assistant Attal, discret mais alerte comme à son habitude, et Robotique conçu pour faciliter les démarches administratives, capable de communiquer en direct avec le siège administratif situé sur la planète mère. Balador et son équipe arpentèrent l’escalier interminable menant à l’entrée. Il ruminait. Tout portait à penser que les jeux politiques au sein de cette Hégémonie seraient aussi vicieux que ceux auxquels il avait pris part au cours de sa longue carrière.

“Encore 3 cycles à tirer et je me retire sur une planète chaude” plaisanta-t-il intérieurement. Cette promesse sous forme de boutade interne lui redonna du baume au cœur. Il pénétra dans l’alcôve principale avec l’esprit d’un renard.

Déjà, il envoyait Attal laisser traîner ses oreilles aux points stratégiques. Bien formé à cet exercice, celui-ci connaissait la musique, comprenant rapidement les rapports de force en analysant les schémas corporels des groupes. Il revenait régulièrement vers Balador pour lui renseigner les sujets phares, les intérêts de chaque parti et les dynamiques de communication.

Légèrement en retrait, pianotant sur l’interface du Robotique avec un air neutre, Balador accumulait les données ramenées par Attal. Il les croisait avec les ressources dont il disposait pour négocier, concoctant ainsi la majeure partie de la soirée un plan d’attaque millimétré. Balador ne gaspillait jamais son énergie à l’aveugle dans des badinages nonchalants et des mondanités sans fin. Le mépris subtil qu’il avait pour ce genre de soirées était paradoxalement ce qui le poussait à rentabiliser ce temps de la façon la plus effective.

Il avait décidé que le chef de la délégation Kartyléenne serait le plus à même de donner accès à l’humanité à des ressources technologiques, nécessaires pour combler leur retard sur les autres espèces. Un retard qui handicapait l’humanité sur toutes les autres négociations, notamment pour augmenter l’efficacité de leurs transports spatiaux et la compétitivité commerciale.

Les Kartyléens avaient toujours compensé leur faiblesse corporelle par des avancées technologiques majeures. Attal avait surpris le chef de leur délégation négocier sans succès la location de puissants mercenaires reptiliens. Sûr de sa domination militaire et technologique, le Consul Reptilien avait toisé son homologue Kartyléen en demandant une compensation exorbitante pour leur “protection”… ni plus ni moins qu’une tentative de vassalisation voilée, typique de ces races sauriennes.

“Cette arrogance les perdra” pensa Balador  “Et nous en tirerons profit” se dit-il tandis qu’il approchait le Kartyléen alors que celui-ci faisait mine de partir, passablement déconfit.

“Monsieur l’Ambassadeur, je suis Balador, chef de la délégation humaine. Je n’ai malheureusement pas encore eu l’occasion d’échanger avec vous. Nouveaux arrivés dans cette Hégémonie, l’humanité aurait besoin des conseils qu’une espèce plus expérimentée telle que la vôtre pourrais lui apporter. S’il vous reste un peu de temps disponible, je vous promets de ne pas vous le faire perdre.”

Le Kartyléen, précédemment douché par le Reptilien, reprit des couleurs devant l’attitude de cette approche, qui contrastait avec le mépris affiché de sa précédente interaction. Voyant le poisson ferré, Balador continua l’interaction sur le même mode, tout en louant subtilement les capacités de manœuvres militaires et l’entraînement intensif des troupes d’élites humaines. Il proposa même de mettre un bataillon entier à la disposition des Kartyléens, en échange de simples conseils.

Cette offre paraissait tombée du ciel pour les Kartyléens, notamment fort portés sur la diplomatie. Il s’empressa d’accepter, revigoré et plein de gratitude envers celui qui avait sauvé sa journée. Le Kartyléen se retira par la suite en saluant chaleureusement Balador, sans porter un seul regard sur les autres délégations.

Alors qu’il rejoignait Attal, Balador arborait un sourire carnassier. Avec cette excellente première impression et ce pied dans la porte, l’humanité avait ouvert des perspectives de montée en puissance largement plus supérieure que la mise à disposition d’un simple bataillon, aussi “d’élite” soit-il.

En choisissant la bonne cible et en provoquant le bon moment, Balador avait réussi un de ces fameux effets de levier.

Texte : F. Marcus / illustration : Verartwork

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